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Les dures leçons des startups

Article original écrit par Paul Graham et accessible ici.
Traduction par , publiée le 06 avril 2010.
Licence : Cette traduction est mise à disposition sous un contrat Creative Commons Creative Commons License

Les dures leçons des startups

(Cet essai est tiré d’une conférence à la startup School 2006)

Les startups que nous avons financés jusqu’à présent sont assez dynamiques mais elles semblent plus promptes encore à retenir certaines leçons que d’autres. C’est surement du au fait que certains points les concernant ne suivent pas le sens général de l’intuition.

Nous avons investi dans suffisamment de sociétés pour que je puisse prétendre avoir assimilé une astuce déterminant quels sont les points qui vont à l’encontre de l’intuition: ce sont tout simplement ceux que je dois répéter continuellement.

Donc, je vais dénombrer ces points et peut-être que pour les futures startups je pourrais en déduire une sorte de code de Huffman, une règle de conduite. Je leur ferais tous lire cela, et au lieu de les harceler avec des détails, je n’aurais qu’à dire: numéro 4.

1. Sortez votre produit rapidement

Cette recette pour startup est probablement celle que je répète le plus souvent. Sortez une version 1 rapidement, ensuite améliorez là en fonction des réactions des utilisateurs.

Je ne veux pas dire que vous deviez présenter quelque chose plein de bugs, mais quelque chose de minimal. Les utilisateurs détestent les bugs mais ils sont plus compréhensifs pour une première version minimale, à plus forte raison si vous comptez bientôt leur soumettre du neuf.

Il y a plusieurs raisons pour cette sortie anticipée de la version 1. L’une d’elle est que c’est la bonne manière d’écrire des logiciels, que ce soit pour une startup ou pas. Je suis en train de répéter cela depuis 1993, et je n’ai pas encore trouvé grand chose infirmant ceci. J’ai vu de nombreuses startups mourrir à cause de leur lenteur à sortir du concret et aucune parce qu’elle fut trop rapide.

Ce qui vous surprendra certainement si vous réalisez quelque chose de populaire c’est que vous ne connaissez pas vos utilisateurs. Reddit reçoit la visite d’à peu près un demi million de visiteurs uniques par mois. Qui sont tous ces gens? Ils ne savent pas. Aucune startup du web ne le sait. Et puisque vous ne connaissez pas vos utilisateurs, c’est très risqué de deviner ce qu’il vont aimer. Mieux vaut sortir quelque chose et les laisser vous dire s’ils aprécient.

Wufoo a appris sa leçon par coeur et a sorti son générateur de formulaires avant la base de données associée. Vous ne pouviez pas encore piloter la chose mais 83 000 personnes sont venues s’asseoir dans le siège du conducteur et ont saisi le gouvernail pour tester. Et Wufoo a obtenu un retour d’information de qualité: les utilisateurs Linux se sont plaint de l’utilisation abusive de Flash, ils ont donc réecrit leur logiciel pour pallier à cela. S’ils avaient attendu pour sortir le tout en une seule fois, ils n’auraient découvert ce problème que lorsque les choix technologiques étaient arrêtés et difficiles à remettre en cause.

Même si vous n’avez pas d’utilisateurs, ce sera toujours important de sortir une version rapidement, parce que pour une startup la première version sortie agit comme un révélateur. Si quelque chose d’important est mal conçu—si l’idée n’est pas bonne par exemple, ou si les fondateurs se détestent mutuellement—le stress d’avoir cette première version sortie l’exposera au grand jour. Et si vous avez ce genre de problèmes, vous voudrez surement le savoir le plus rapidement possible.

Cependant, la plus importante des raisons est que cela compliquera grandement votre travail. Lorsque vous travaillez sur un projet qui n’est pas encore diffusé, les problèmes sont intriguants. Pour un projet qui est déjà sur la place publique, les problèmes sont alarmants. Il y a beaucoup plus d’urgence une fois que vous sortez votre première version. Et je pense que c’est précisément la raison pour laquelle les gens exposent leur projet. ils savent qu’ils devront travailler bien plus durement une fois la sortie effectuée.

2. Délivrez des fonctionnalités

Bien sur, sortir une version par anticipation comporte un aspect supplémentaire sans lequel ce serait un très mauvais conseil. Si vous démarrez avec une application qui ne fait pas grand chose vous feriez mieux de l’améliorer le plus vite possible.

Ce que je répète avec insistance c’est délivrez des fonctionnalités. Et cette règle n’est pas seulement valable pendant la phase initiale. C’est ce que toute startup devrait continuer de faire aussi longtemps qu’elle souhaite être considérée comme une startup.

Je ne veux pas signifier, bien entendu, que vous devriez rendre votre projet encore plus complexe. Par fonctionnalité je veux dire une façon de simplifier la vie des utilisateurs.

Comme pour l’entrainement, les améliorations engendrent d’autres améliorations. Si vous courrez tous les jours, vous aurez probablement envie de courir demain. Mais si vous arrêtez pour une ou deux semaines, cela vous demandera un effort pour reprendre le jogging. Ainsi en va-t-il pour les fonctionalités: plus vous implémentez d’idées plus vous aurez d’idées nouvelles. Vous devriez améliorer votre système un petit peu chaque jour.

Ce n’est pas seulement une bonne manière de réaliser vos développements; c’est aussi une forme de marketing. Les visiteurs adorent les sites internet qui s’améliorent constamment. En fait, ils s’attendent à des améliorations. Imaginez que vous visitiez un site qui semble très bon et qu’ensuite vous le visitiez à nouveau deux mois plus tard mais que rien n’ai changé. Ce site ne commencerait-il pas à devenir banal à vos yeux?

Les utilisateurs vous apprécieront d’autant plus si vous améliorez votre application en réponse à leurs commentaires et à leurs demandes car ceux-ci sont d’ors et déjà habitués aux sociétés qui les ignorent. Si vous êtes l’exception rare—une société qui écoute vraiment—vous allez susciter une fidélité sans commune mesure. Vous n’aurez plus besoin de faire de la publicité car vos utilisateurs la feront pour vous.

Tout cela semble évident, pourquoi dois-je donc le répéter à nouveau? Je pense que le problème ici c’est que les gens s’habituent aux choses. Dès qu’un produit dépasse la phase ou il comportait de criantes imperfections, on commence à s’y habituer et progressivement ses fonctionnalités deviennent son identité. Par exemple, je doute que les gens de Yahoo (ou Google) aient pu se rendre compte à quel point on pouvait améliorer le mail sur le web avant que Paul Buchheit le leur montre.

Je pense que la solution c’est de supposer que tout ce que vous avez fait est loin d’être parfait. Forcez vous, comme dans un exercice intellectuel, à penser constamment aux améliorations que vous pourriez apporter. Ok, ce que vous avez déjà est parfait, mais si vous deviez changer quelque chose, ce serait quoi?

Si votre produit semble fini, il y a deux possibilités:(a) il est réellement fini, ou (b) vous manquez d’imagination. L’expérience montre que (b) a mille fois plus de chance d’être la réalité.

3. Contentez vos utilisateurs

L’amélioration constante fait partie d’une règle plus générale: contentez vos utilisateurs. Ce que toutes les startups ont en commun c’est qu’elles ne peuvent forcer qui que ce soit à faire quoi que ce soit. Elles ne peuvent vous contraindre à utiliser leur logiciel et elles ne peuvent vous obliger à traiter avec elles. Une startup doit chanter la sérénade pour avoir sa soupe. C’est pourquoi celles qui rencontrent le succès font de grandes choses. Elles doivent les faire sinon elles meurent.

Lorsque vous gérez une startup vous vous sentez comme un fétu de paille balloté par des vents puissants. Le vent le plus puissant c’est les utilisateurs. Ils peuvent soit vous porter au firmament, comme ils l’ont fait avec Google, soit vous laissez crever sur le trottoir comme ils l’ont fait avec de nombreuses startups. Les utilisateurs sont un vent instable et volage mais plus puissant que n’importe quel autre. S’ils vous portent aux nues aucune compétition ne saurait vous faire tomber.

Comme un petit fétu de paille, la chose la plus rationnelle à faire n’est pas de mentir ou de ruser mais de prendre la forme la plus appropriée pour que ce vent vous emporte.

J’aime la métaphore du vent car elle rappelle combien les flux de circulation sont impersonnels. La grande majorité des personnes qui visitent votre site seront des utilisateurs occasionnels. C’est pour eux que vous devrez concevoir votre site. Les autre personnes, plus concernées, trouveront ce qu’elles recherchent par elles même.

Le visiteur lambda arrivera avec son doigt suspendu au dessus de la touche Retour. Pensez à votre propre expérience: la plupart des liens que vous suivez mènent à quelque chose de banal. Quiconque surfe sur le web depuis plus de deux semaines est déjà entrainé à cliquer sur la touche retour après avoir suivi un lien. Donc votre site doit dire: ” Attendez! Ne cliquez pas sur la touche retour. Ce site n’est pas banal. Regardez ça par exemple.”

Il y a deux choses à faire pour que les gens s’arrêtent sur votre site. La plus importante est d’expliquer, aussi simplement que possible, la raison d’être de votre site. Combien de fois avez-vous visité des sites qui semblent supposer que vous savez déjà ce qu’ils font? Par exemple un site d’entreprise qui dit que leur société fait:

des solutions de gestion de contenu d’entreprise pour les affaires, qui permettent aux organisations d’unifier les processus, les contenus et les personnes afin de minimiser les risques, d’accélérer le retour sur investissement et de supporter de moindres coûts d’acquisition.

Une entreprise déjà établie peut se permettre de sortir une description aussi opaque mais pas une startup. Une startup doit être capable d’expliquer ce qu’elle fait exactement en une ou deux expressions. Et pas seulement aux utilisateurs. Elle doit le faire pour tous: investisseurs, acquéreurs, partenaires, journalistes, employés potentiels et même les personnes déjà en poste. Vous ne devriez probablement jamais lancer une société qui fait quelque chose qui ne peut être décrit en une ou deux expressions.

La seconde chose à faire c’est de donner aux gens tout ce que vous avez. Si vous avez quelque chose d’impressionant, essayez de le mettre en page d’accueil car c’est la seule que verront la plupart des utilisateurs. Quoique, en effet il y a un paradoxe ici: plus vous montrez les choses interesantes en page d’accueil, plus vos visiteurs seront amenés à explorer votre site plus en profondeur d’ou une certaine exigence d’excellence.

Dans le meilleur des cas, ces deux suggestions seront combinées: vous dites à vos visiteurs ce qu’est votre site en leur montrant. Un des conseils standard dans l’écriture de fictions est “montrez, ne racontez pas”. Ne dites pas qu’un personnage est en colère; montrez le en train de grincer des dents ou de casser son crayon en deux. Rien n’expliquera mieux ce que fait votre site que de l’utiliser.

Le terme industriel ici est “conversion”. Le but de votre site est de convertir les visiteurs occasionnels en utilisateurs—quelque soit votre définition d’un utilisateur. Vous pouvez mesurer cela avec votre taux de croissance. Soit votre site est attractif, soit il ne l’est pas et vous devez savoir pourquoi. Si vous avez une croissance décente vous finirez par gagner, quelque soit la confusion actuelle. Sinon vous devez changer quelque chose.

4. Cernez les bonnes inquiétudes

Une autre chose que je dis souvent, c’est: “pas d’inquiétude”. En réalité c’est plus souvent “pas d’inquiétude pour ceci. inquiétez vous pour cela plutôt”. Les startups ont le droit d’être paranoïaques, mais elles se trompent parfois et craignent les mauvaises choses.

Les désastres les plus voyants ne sont pas aussi alarmants qu’il y parait. Les désastres sont communs dans une startup: un fondateur abandonne le projet, vous découvrez qu’un brevêt couvre votre activité, votre server crash de temps à autre, vous rencontrez des problèmes techniques insolubles, vous devez changer votre nom de société car il est déjà déposé, une affaire capote—tout cela fait parti de l’environnement de la startup. Ces problèmes ne vont pas vous tuer à moins que vous ne les laissiez faire.

La compétition ne vous tuera pas non plus. Nombre de startups s’inquiètent: “que va-t-il arriver si Google sort un projet comme le notre?” En fait les grosses sociétés ne sont pas celles que vous devez craindre—pas même Google. Les gens de chez Google sont futés, mais pas plus que vous ne l’êtes; ils ne sont pas aussi motivés, car la survie de leur société ne dépend plus d’un seul projet; et même chez Google ils ont beaucoup de bureaucratie pour les ralentir.

Ce que vous devez craindre en tant que startup, ce ne sont pas les acteurs déjà établis, mais les autres startups dont vous ne connaissez pas encore l’existence. Elles sont bien plus dangereuses que Google car elles sont comme vous, des bêtes sauvages acculées au pied du mur.

Se renseigner sur la compétition existante peut vous donner une fausse impression de sécurité. Vous devez entrez en compétition contre ce que d’autres pourraient faire, et non seulement contre ce que les autres font. Le corrollaire est que vous ne devez pas vous relacher car vous n’avez pas encore de compétiteurs visibles. Quelque soit votre idée il y a quelqu’un d’autre quelque part en train de travailler sur la même chose que vous.

C’est l’inconvénient lié à la facilité de créer une startup: tout le monde le fait. Mais je suis en désaccord avec Caterina Fake quand elle dit que ce n’est pas le bon moment pour lancer une startup. Beaucoup de gens démarrent des startups, mais il pourrait y en avoir bien plus encore. La plupart des diplômés d’université continuent de penser qu’ils doivent obtenir un boulot classique. La personne lambda ne peut faire abstraction de sa vocation, grâvée dans son esprit depuis l’age de trois ans, juste parce qu’il est plus facile et moins cher aujourd’hui de publier des pages web.

Dans tous les cas, la compétition n’est pas la menace la plus grâve. Beaucoup de startups se coulent elles-mêmes et se font ensuite écraser par la compétition. Ils y a de nombreuses manières de le faire, mais les trois principales sont les disputes internes, l’inertie et la négligence des utilisateurs. Chacune est suffisante par elle-même pour tuer votre affaire. Si je devais désigner la pire ce serait la négligence des utilisateurs. Si vous voulez un tuyau pour une startup en déclin, le voici: une paire de fondateurs qui ont une idée qui va plaire à tout le monde, et c’est ce qu’il vont construire quelque soit l’idée.

Presque tous les plans de démarrage sont mal conçus. Si les sociétés se tenaient à leur plans de démarrage, Microsoft vendrait encore des langages de programmation et Apple fournirait des circuits imprimés de carte mère. Dans les deux cas leurs clients leur ont dit ce que devait être leur business—et ils on été assez malins pour les écouter.

Comme le dit Richard Feynman, l’imagination de la nature est bien plus grande que l’imagination de l’homme. Vous trouverez plus d’idées interessantes en observant le monde que vous ne pourriez en produire juste en pensant. Ce principe est extraordinaire. C’est pourquoi les plus belles peintures d’art abstraites ne sont rien comparées à l’oeuvre de Leonard de Vinci, par exemple. Et cela s’applique aussi aux startups. Aucune idée de produit ne pourra jamais être aussi ingénieuse que celle que vous pourriez découvrir en confrontant une série de prototypes à une série d’utilisateurs.

5. L’engagement est une prophétie qui se réalise elle-même

J’ai suffisament d’expérience avec les startups pour être en mesure de dire ce qu’est la qualité la plus importante chez l’entrepreneur qui démarre une startup, et ce n’est pas ce à quoi vous pourriez penser. La qualité la plus importante du fondateur de startup est la détermination. Pas l’intelligence—la détermination.

C’est un peu déprimant. J’aime à croire que Viaweb a eu du succès parce que nous étions futés. De nombreuses personnes dans le monde des startups veulent croire cela. Pas seulement les fondateurs, les investisseurs aussi. Ils sont séduit par l’idée d’un monde gouverné par l’intelligence. Et vous pouvez voir qu’ils le croient vraiment puisque cela affecte leurs décisions d’investissement.

Chaque jour les capital-risqueurs investissent dans des jeunes pousses fondées par d’éminents professeurs. Cela peut fonctionner dans la biotechnologie où les startups commercialisent tout simplement le résultat de recherche préexistantes, mais dans le domaine du logiciel il faudrait parier sur les étudiants, non sur les professeurs. Microsoft, Yahoo et Google furent toutes fondées par des gens qui cessèrent leur études pour les affaires. Ce qu’il leur manquait en expérience, ils l’ont compensé en dévouement et en ténacité.

Bien entendu, si vous voulez devenir riche, la détermination ne suffira pas. Vous devrez aussi être brillant, n’est-ce pas? Je me plait à le croire, mais j’ai eu une expérience qui m’a convaincu de penser autrement: J’ai vécu plusieurs années à New York.

Vous pouvez manquer d’intelligence et cela ne vous tuera pas. Mais osez manquer d’un peu de détermination et cela vous tuera très rapidement.

Faire fonctionner une jeune pousse, c’est comme marcher sur les mains: c’est possible mais cela requiert un effort extraordinaire. Si un employé ordinaire devait effectuer les tâches dévolues au créateur de startup il serait révolté. Imaginez un instant que vous êtes embauché dans une grande société et qu’en plus de devoir écrire des logiciels dix fois plus vite qu’auparavant, il vous soit demandé d’assurer le support téléphonique, d’administrer les serveurs, de concevoir le design du site web, de rappeller les clients, de trouver les bureaux de la société et de faire diner tout les employés à l’extérieur.

Ajoutez que vous seriez contraint de réaliser toutes ses tâches, non pas dans le calme et la sérénité des grosses sociétés, mais dans le contexte stressant et angoissant des désastres inhérents aux startups. C’est la partie qui demande une réelle détermination. Dans une startup il y a toujours un désastre en cours. Alors si vous êtes enclins à quitter le navire à la moindre excuse, vous en trouverez toujours une assez valable à portée de main.

Mais si vous manquez d’engagement, il y a de grandes chances que vous n’ayez même pas le loisir de penser à quitter le navire. Tous ceux qui ont affaire aux startups savent l’importance de l’engagement et si vous n’êtes pas sur de vous ils ne vous prendront pas au sérieux et ne feront pas attention à vous. Sans engagement, vous vous rendrez compte que pour de mystérieuses raisons, les bonnes choses arrivent à vos concurrents mais pas à vous. Vous aurez l’impression d’être malchanceux.

Puisque vous êtes déterminé à rester, les gens vous prendront en compte car ils auront la possibilité de traiter avec vous ultérieurement. Vous êtes présent, vous n’êtes pas juste un touriste et tous devront traiter avec vous.

Chez Y Combinator nous avons investi parfois par erreur sur des équipes qui avait l’attitude et qui semble-t-il pouvaient tenir au moins trois mois, et qui allaient s’y coller si quelque chose de bien leur arrivait—par quelque chose de bien j’entends qu’un acheteur potentiel serait interessé ou qu’il investirait des millions de dollar sur eux. Si telle est votre attitude, “quelque chose de bien” ne risque pas de vous arriver car autant les acheteurs que les investisseurs vous jugeront sur votre niveau d’engagement.

Si un acheteur pense que vous allez y arriver, il sera plus enclin à vous acheter, car s’il ne le fait pas et que vous percez, vous allez croître et votre prix aussi va grandir, et il restera la en pensant qu’il aurait du vous achetez avant. Même chose pour les investisseurs. Ce qui motive réellement les investisseurs, même les grands capital risqueurs, ce n’est pas tant l’espoir d’un bon retour sur investissement mais la crainte de perdre une bonne affaire. Si vous êtes certain de réussir et que la seule raison de faire appel à eux est d’accélérer cette réussite, vous êtes alors en mesure d’obtenir de l’argent.

Vous ne pouvez simuler cela. La seule manière de convaincre quiconque que vous êtes prêt à vous battre à mort c’est de l’être réellement.

Cependant vous devez posséder la bonne détermination. J’ai choisi soigneusement le mot déterminé plutôt que tétu. L’entêtement est une vraie calamité pour un dirigeant de startup. Vous devez être déterminé mais flexible comme le “running back” au footbal Américain.

Un bon running back ne doit pas juste baisser la tête et foncer à travers les gens. Il improvise: si quelqu’un apparait en face de lui il contourne; si quelqu’un essaie de l’attraper il s’échappe de la prise; il ira même brièvement dans la mauvaise direction si cela débloque la situation. La seule chose qu’il ne fera jamais c’est de rester calme.

6. Il y a toujours de la place

Je discutais dernièrement avec un créateur de startup à propos du bien fondé d’ajouter un composant social à leur logiciel. Il a dit qu’il pensait que ce n’était pas utile car les logiciels sociaux etaient sur-représentés. Vraiment? Donc dans une centaine d’années les seuls sites de réseautage social seront Facebook, MySpace, Flickr et Del.icio.us? Pas vraiment.

Il y a toujours de la place pour de nouvelles choses. A chaque moment de l’histoire, même dans les instants les plus sombres des époques les plus obscures, les gens découvraient des choses qui faisaient s’exclamer les autres ainsi: “pourquoi personne n’a pensé à ça avant?” Nous savons que cela n’a jamais cessé d’être vrai jusqu’à l’année 2004, quand Facebook fut crée—donc à proprement parler quelqu’un d’autre a pensé à cela.

La raison pour laquelle nous ne voyons pas les opportunités autour de nous est que nous nous adaptons à l’existant et supposons que c’est ainsi que les choses doivent être. Par exemple, cela pourrait sembler fou pour la plupart des gens d’essayer de créer un meilleur moteur de recherche que Google. Assurément cette place au moins est déjà prise. Vraiment? Dans une centaine d’années—ou même vingt ans—les gens continueront-ils à rechercher de l’information avec un outil ressemblant de près ou de loin au Google actuel? Même Google ne pense probablement pas ça.

En particulier, je ne crois pas qu’il y est une quelconque limite au nombre de startups. On entend parfois des personnes dire: “Tous ces gars qui se lancent dans des jeunes pousses vont être très déçus. Combien de petites startups Google et Yahoo vont-ils acheter après tout? Cela ressemble à du septicisme informé mais je peux prouver que c’est une grossière erreur. Personne ne propose une limite au nombre de gens qui peuvent être employées dans une économie constituée de grosses sociétés lentes et rétives au changement. Pourquoi y aurait-il une limite au nombre de personnes qui pourraient être employées dans de petites structures dynamiques et flexibles d’environ dix personnes chacune? Il me semble que la seule limite soit le nombre de personnes qui acceptent de travailler aussi durement que dans une startup.

Ce qui limite vraiment le nombre de jeunes pousses n’est pas la quantité dont Google et Yahoo peuvent faire l’acquisition—bien que celle-ci semble aussi sans limite, si ces startups valent le coup d’être achetées—mais la somme de richesse qui peut être crée. Et je ne croit pas qu’il y est une quelconque limite à cela.

Donc pour tous les objectifs concrets, il n’y a pas de limite au nombre de startups. Celles-ci sont créatrices de richesse, ce qui signifie qu’elles créent ce que les gens souhaitent, et si il y a une limite aux désirs des gens, nous sommes très loin de l’avoir atteinte. Je ne possède toujours pas de voiture volante.

7. N’ayez pas trop d’espoirs

Encore une règle que je ne cesse de rabacher depuis longtemps, bien avant la création de Y Combinator. Ce fut pratiquement notre slogan d’entreprise à Viaweb.

Les créateurs de jeunes pousses sont d’un naturel optimiste. Il ne serait pas créateur sinon. Mais vous devez gérer votre optimisme de la même façon que vous géreriez le coeur d’un réacteur nucléaire: comme une source de puissance qui est aussi très dangereuse. Vous devez construire un bouclier autour ou il finira par vous griller.

La protection d’un réacteur n’est pas uniforme; le réacteur serait alors sans utilité aucune. Il est percé à certains endroits pour laisser entrer des tuyaux. Le bouclier de votre optimisme se doit aussi de posséder des ouvertures. Je pense que l’endroit précis est situé entre ce que vous exigez de vous même et ce que vous attendez des autres. C’est d’accord pour l’optimisme à propos de ce que vous pouvez faire, mais supposez toujours le pire quand à ce qui concerne les machines et les autres personnes.

Cela est particulièrement nécessaire dans une startup, car vous aurez tendance à sans cesse repousser les limites dans tout ce que vous faites. Malheureusement les choses ne se passent pas en douceur, de façon prévisible comme dans le reste du monde. Les changements sont soudains et généralement pour le pire.

Protéger votre optimisme est surtout très important pour tout ce qui concerne les affaires. Si votre startup monte une affaire, envisagez le fait que cela puisse capoter. Le capital risqueur qui a dit qu’il investirait ne le fera pas. La société qui prétendait vous acheter se désistera. Le gros client qui voulait utiliser votre système sur tous les postes de sa société changera d’avis au dernier moment. Alors si tout fonctionne bien vous serez agréablement surpris.

La raison pour laquelle je préviens les startups et les engage à ne pas trop espérer n’est pas tant pour les sauver de la déception lorsque les choses se passent mal. C’est pour une raison bien plus pragmatique: pour les empêcher de s’appuyer sur quelque chose qui risque de s’écrouler à tout instant, en les entrainant au passage.

Par exemple, si quelqu’un vous dit qu’il veut investir dans votre projet, il y a une tendance naturelle à arrêter de chercher d’autres investisseurs. C’est pourquoi les gens proposant des transactions semblent si positifs: ils veulent que vous arrêtiez de chercher. Et vous le souhaitez aussi car négocier des affaires est particulièrement stressant et douleureux. Lever des fonds, particulièrment, est une activité qui prend énormément de temps. Donc vous devez vous contraindre en toute conscience et persévérer dans votre recherche d’investisseurs alternatifs.

Même si en fin de compte vous finalisez votre première transaction, cela aura été à votre avantage d’avoir persévéré dans la recherche d’autres investisseurs car vous bénéficierez de meilleurs termes. Les affaires sont très dynamiques; a moins de négocier avec une personne inhabituellement honnête, il n’y aura pas un seul point ou vous pourrez vous contenter de vous serrer la main et hop l’affaire est dans la poche. Il reste toujours de nombreuses questions subsidiaires à régler après la poignée de main et si la partie adverse sent votre faiblesse—s’il sentent que cette affaire est cruciale pour vous—ils seront très tentés de vous baiser dans les détails.

Les capital risqueurs et les développeurs de société sont des négociateurs professionnels. Ils sont entrainés à profiter des faiblesses. Aussi, bien que ce soit des gars sympas il ne peuvent rien faire pour vous. Et en tant que professionnels ils font cela bien plus souvent que vous. Donc n’essayez même pas de les bluffer. Le seul moyen pour une startup d’avoir du poids dans la négociation d’une transaction c’est de réellement pouvoir s’en passer. Et si vous ne croyez pas dans une transaction vous serez moins dépendant d’elle.

Je voudrais donc implanter une suggestion hypnotique dans vos esprits: lorsque vous entendez quelqu’un prononcez ces mots “nous voulons investir dans votre projet” ou “nous voulons vous acheter”, je veux que la phrase suivante apparaisse automatiquement dans votre tête: n’espérer pas trop. Continuez à faire tourner votre société comme si de rien n’était.

La façon de réussir dans une startup est de se focaliser sur l’objectif de convertir beaucoup d’utilisateurs, et de s’en approcher le plus vite possible, tandis que les investisseurs et les acheteurs feront la course à coté de vous et essayeront de se faire de l’argent sur votre compte.

La vitesse, pas l’argent

A la manière dont je l’ai décris le lancement d’une startup semble très éprouvant. Il l’est réellement. Quand je parle aux fondateurs des sociétés que nous avons financées, ils disent tous la même chose. Je savais que ce serait dur, mais je n’est jamais réalisé à quel point ce serait aussi difficile.

Alors pourquoi le faire? Cela vaudrait la peine d’endurer tant de stress et d’épreuves pour concrétiser quelque chose de grandiose ou d’héroïque, mais tout ça juste pour gagner de l’argent? Faire de l’argent est-il si important?

Non, pas vraiment. Cela me semble ridicule lorsque les gens prennent les affaires trop au sérieux. Je perçois les affaires comme une course ennuyante à gagner le plus vite possible. Il n’y a rien de grand ou d’héroïque à lancer une startup.

Alors pourquoi je consacre autant de temps à penser aux startups? Je vais vous dire pourquoi. Economiquement parlant, une startup est envisagée non pas comme un moyen de devenir riche, mais comme un moyen de travailler plus vite. Vous devez assurer votre subsistance et une startup est le moyen de faire cela rapidement, au lieu de vous prendre toute une vie.

Nous la tenons pour garantie la plupart du temps mais la vie humaine est assez miraculeuse. Elle est aussi relativement courte. On vous donne cette chose merveilleuse et puis pouf, on vous la reprend. Vous pouvez comprendre pourquoi les gens inventent des dieux pour expliquer tout cela. Mais même pour ceux qui ne croient pas dans les dieux, la vie commande le respect. Il y a des moments dans nos vies à tous ou les jours s’enfuient dans un brouillard informe et lorsque cela arrive, quasiment tout le monde a la sensation de perdre quelque chose de précieux. Comme dit Ben Franklin, si vous aimez la vie ne perdez pas de temps car le temps est la matière première de la vie.

Donc non, il n’y a rien de particulièrement grand à faire de l’argent. Ce n’est pas ce qui fait qu’une startup vaut le coup d’être crée. Ce qui est important concernant les startups c’est la vitesse. En compressant les tâches ingrâtes mais nécessaire pour gagner votre vie, dans l’intervalle de temps le plus court possible vous montrez du respect pour la vie, et il y a là quelque chose de grand.


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